« Renouez avec votre énergie féminine », « éveillez votre Féminin sacré »… Le Féminin sacré, terme à la mode, est partout et fait l’objet de toutes les attentions. La notion n’est pas aisée à définir. A la croisée du développement personnel, du féminisme, voire de l’écoféminisme, et de la spiritualité, le Féminin sacré invite chacune à définir ce que veut dire « être une femme » et à répondre à ces questions : « Quelle est ma valeur en tant que femme ? Suis-je simplement un être humain ou ai-je en moi des dimensions qui me différencient des hommes ? Et si oui, comment les reconnaître et les valoriser ? »
Le Féminin sacré, qu’est-ce que c’est ?
Commençons par le début. Dans « Féminin sacré », le terme de féminin renvoie à notre essence, notre polarité féminine, présente chez tous, aussi les femmes que les hommes. Il se réfère à cette part tournée vers l’intériorité, faite de lenteur, écoute, intuition, de patience. Le mot sacré, quant à lui, généralement associé à la religion, signifie étymologiquement « honorer ». Le Féminin sacré nous invite à honorer toutes les facettes qui font partie de la vie d’une femme et d’y inclure, au-delà du quotidien, du travail et de la famille, cette énergie féminine, voire spirituelle. Il puise ses racines à l’époque de la Préhistoire, où tout ce qui était sacré se référait au féminin, comme en témoignent les statuettes de Vénus.
Aujourd’hui, après 5000 ans de patriarcat, les femmes ne peuvent faire l’économie de s’interroger sur l’impact que ce modèle social a dans leur vie et leur construction identitaire. Beaucoup ressentent le désir de retrouver, de valoriser ce quelque chose peut-être difficile à définir en lien avec leur corps de femme et avec la nature et qui puisse les aider à déployer leur puissance. Se reconnecter avec son Féminin sacré, c’est opérer une transformation en soi qui permette, en écoutant son corps, son cœur, son intuition, de devenir plus libre. C’est fouler un chemin initiatique qui encourage à la fois à devenir la femme que l’on devine en soi et à se connecter à plus grand que nous dans une quête de transcendance.
Le Féminin sacré, une branche de l’écoféminisme
La notion de Féminin sacré entretient des liens évidents avec lé féminisme, et notamment avec l’écoféminisme, mouvement à la fois philosophique, éthique et politique. Ce terme est apparu pour la première fois en 1974 dans l’ouvrage Le Féminisme ou la mort de la militante Françoise d’Eaubonne. Le mouvement prend réellement forme dans les années 80, à partir de la thèse que les mêmes mécanismes seraient à l’œuvre à la fois dans la façon dont l’homme exploite la nature et dans la façon dont les hommes exercent une domination sur les femmes. Dès lors, aucune révolution écologique ne saurait advenir sans une révolution féministe, seule à même de porter un remède à ce système de domination mis en place par les hommes.
Cette approche prône une protection de la nature et des femmes basée sur l’éthique, notamment l’éthique du « care », du soin, plutôt que sur des dispositifs techniques imposés par des décideurs. L’écoféminisme tente de remettre au centre de l’attention la nature cyclique de la nature, présente également chez les femmes à travers le cycle menstruel. Il incarne un désir d’émancipation qui se détache du « pouvoir sur » autrui pour faire émerger le « pouvoir du dedans », un pouvoir qui n’est pas une arme, mais une capacité à agir.
Le risque de l’essentialisme
C’est la critique principale adressée à l’écoféminisme et qui peut être faite également au Féminin sacré. Soutenir que les femmes auraient un savoir ou des capacités spéciales pour prendre soin de la nature serait une vision essentialiste de « mère nourricière ». Cela serait au final une autre forme de limitation, d’enfermement des femmes dans un rôle prescrit par d’autres, là où au contraire, la démarche se veut à la base libératrice.
Pourquoi cette émergence du Féminin sacré, et pourquoi maintenant ?
Si le mouvement du Féminin sacré prend de l’ampleur à ce moment de l’histoire de notre société, c’est qu’il fait écho à des préoccupations déjà présentes, notamment celles du féminisme, comme déjà évoqué. On peut dire néanmoins qu’il le renouvelle. En effet, il y a aujourd’hui une prise de conscience que la société fonctionne sous un modèle normé par des valeurs masculines : performance, action, compétition et réussite sont valorisés et apparaissent comme désirables. Si les premiers mouvements féministes restaient dans ce modèle en demandant que les femmes sortent de chez elles et puissent accéder à la même réussite matérielle que les hommes, le Féminin sacré est une invitation à se démarquer de ce modèle linéaire et compétitif.
Les femmes veulent maintenant se reconnecter à leur énergie féminine, à leur sensibilité. Ce désir s’exprime notamment par la libération de la parole qui a eu lieu avec le mouvement #MeToo, où les femmes se sont autorisées à révéler ce qui les blessaient, à évoquer leur vécu de femme, qui était auparavant tu, voire ressenti comme honteux. Elles ressentent le besoin de se libérer des étiquettes, des stigmates attachés à la condition de femme pour atteindre une complétude. Ces préoccupations expliquent que le mouvement du Féminin sacré provoque de l’engouement.
Une quête de transcendance
Le Féminin sacré répond de plus à une autre recherche, plus spirituelle. De nombreuses personnes qui ressentent une perte de sens, soit dans leur travail, soit par les excès d’une société matérialiste, ressentent un désir de transcendance, de se relier à quelque chose de plus grand qu’eux. Il s’agit de se connecter à ce qui nous échappe, à l’invisible, en vivant une forme d’Amour avec un grand A. Il ne s’agit pas d’une forme de spiritualité dogmatique, mais bien connectée à la sensibilité de chacune, par exemple sous forme de pratiques et rituels qui permettent de la vivre dans le corps.
Qu’est-ce que le Féminin sacré peut apporter et à qui ?
Le féminin ne peut s’envisager sans le masculin. Il s’agit de deux polarités que nous possédons tous en nous à des degrés divers. Notre polarité féminine est celle qui est tournée vers l’intérieur, vers son intuition, vers l’Amour. Notre polarité masculine nous pousse vers l’extérieur, l’action, l’organisation. Notre société qui valorise beaucoup la seconde a étouffé notre polarité féminine. Se connecter à sa part de féminin permet aux femmes de retrouver leur sensibilité, leur capacité à être touchées émotionnellement, sans que cela soit vécu comme une fragilité ou une faiblesse.
Cela leur permet de trouver une forme d’unification, un rééquilibrage où il est autorisé d’être dans l’action tout en ressentant les choses depuis un espace dégagé d’une rigidité imposée de l’extérieur et qui ne leur appartient pas en propre. Bien sûr, si les femmes sont le plus sensibles à la notion de Féminin sacré, elles ne sont pas les seules concernées. Les hommes aussi peuvent tout à fait développer leur facette féminine et rendre plus fluides leurs ressentis et leurs expressions émotionnels.
Comment peut se matérialiser le Féminin sacré dans nos vies ?
Cela étant dit, comment s’y prend-on concrètement ? En quoi consiste l’éveil au Féminin sacré ? Voici-dessous quelques axes à suivre pour aider à se connecter à l’énergie féminine qui sommeille en chacun de nous.
- Commencer par se déconnecter
Se retrouver soi-même implique d’avoir l’espace et le temps pour le faire. La première des choses est donc de se ménager des moments pour soi où l’on se déconnecte, de son téléphone, des réseaux sociaux, des flux d’informations et des injonctions incessants, du souci de notre apparence. Il est bon également de garder en tête quelques questions essentielles : de quoi ai-je envie ? quelles sont mes aspirations ? que veut dire pour moi être une femme ? - Écouter son corps
Notre corps est notre plus précieux allié. Apprendre à l’écouter nous aide à mieux nous comprendre. Face à telle ou telle situation, comment réagit mon corps ? Par des frémissements, des tensions, une ouverture, une détente ? Notre corps nous envoie des messages, que nous pouvons apprendre à écouter. - Stimuler son énergie créatrice
L’énergie féminine est une énergie de création, alors osons créer ! Nul besoin d’expertise ou de compétences pour cela. Seul.e et dans un moment de calme, autorisez-vous à écrire, à dessiner, chanter ou danser… Le but n’est pas de produire un œuvre d’art achevée, mais de laisser notre corps et notre ressenti s’exprimer dans un processus actif. - Oser les rituels
Un rituel peut être un moment pour soi, teinté d’une intention particulière. Vous pouvez inventer vos propres rituels, ou vous inspirer d’idées existantes. Certains permettent de se reconnecter à la nature et à ses cycles. Vous pouvez par exemple prendre le temps de faire un bilan ainsi que des projets à chaque Nouvelle Lune, qui marque le début d’un nouveau cycle. Lorsque la lune décroît, c’est le moment de nettoyer et faire le tri pour se préparer à un renouveau. - Participer à des cercles de femmes
Le Féminin sacré ne se vit pas que dans la solitude, loin de là. Vous pouvez participer à un cercle de femmes, également appelé « Tente rouge », où les femmes se parlent à cœur ouvert. Un bon moyen de trouver du réconfort, de se sentir appartenir à un groupe, de réaliser que d’autres que nous traversent des problématiques similaires. C’est aussi une source de partage et d’inspiration qui donne à voir de nombreuses autres façons de vivre sa féminité à sa manière.
Des livres de référence pour aller plus loin et vous reconnecter à votre Féminin sacré
- La puissance du féminin, Libre, sereine et sacrée : renouez avec vos forces profondes, de Camille Sfez, aux éditions Leduc ;
- Âme de sorcière ou la magie du féminin, d’Odile Chabrillac, aux éditions Pocket ;
- Le grand livre du Féminin sacré, de Josée-Anne Sarazin-Cote, aux éditions Marabout ;
- Toutes des sorcières, 60 rituels pour se connecter à sa puissance féminine, d’Aurélie Godefroy, aux éditions Larousse
- La tente rouge, roman d’Anita Diamant, aux éditions Robert Laffont.